Yves ZURSTRASSEN ou La
Peinture déchirée…
En vue de son exposition personnelle à la Galerie Valérie Bach du 13 septembre au
1er novembre 2014, le peintre Yves Zurstrassen a produit cette dernière année
une série de toiles, toujours en grand format, exprimant dans la bichromie noir
et blanc sa sensibilité tout en délicatesse et en citations.
On sait combien est sincère le travail de ce peintre, qui n’a jamais
renié la peinture, la vraie, celle qui se relie, par les techniques et les
matières utilisées, à l’histoire de la grande manière picturale. Ses moyens d’expressions
sont simples car traditionnels, mais
d’une savante complexité conceptuelle.
Inlassablement depuis près de 40 ans, il remet sur le métier une
pratique très concentrée de la peinture, archivant, cataloguant et documentant
son œuvre tel un chercheur obstiné, au sein de son grand atelier. En alchimiste
moderne, Yves Zurstrassen interroge cette matière qui le fascine, cherchant
dans le passage des brosses, dans les épaisseurs des formes pochées, dans les
mats et rudes à-plats de noir, une métaphysique à sa quintessentielle nécessité
de peindre. Dans une dialectique très savante, il affronte cette gestuelle
spontanée, parfois violente, mais jamais rageuse, au délicat souci du motif
floral, stellaire, ondulant, volatile, images répétitives. C’est dans la déchirure
– la peinture déchirée - qu’il exprime sans doute cette fertile opposition,
ainsi que dans l’affrontement sourd et lumineux du blanc et du noir.
Ce Gargantua, soucieux du détail et du fini, présente ici un travail
empreint de ferme bonhomie, à son image. Il répète les motifs du pochoir à
l’infini, dans des variations sur un même thème, disant en creux et sur chaque
toile un message fait d’observation des grands maîtres universels, anonymes ou
non. Car ils ne sont jamais loin les Nabis, les Twombly, les Richter et les Matisse,
dans sa recherche de motifs archétypaux et décoratifs, confrontés au vif et
vivant bouillonnement de la génération spontanée de formes et de glyphes. Yves
Zurstrassen peint comme il est : vrai. Vrai comme ces formes multipliées, ici
violentés par la déchirure du support lui-même, encore frais. Yves ne cache pas
ses emprunts au Japon, aux célèbres Katagami, ces pochoirs utilisés dans la
décoration textile ; il fait humblement référence à la graphie aborigène en
l’introduisant dans une facture européenne. Il n’y a pas de faux-semblants, pas
de mystification. Juste la peinture déchirée, en ombres et lumières,
révélatrice de nouvelles picturalités.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire